Après avoir identifié les éléments internes et externes, voici une matrice de confrontation qui permet de les combiner et de définir une orientation stratégique pour l’entreprise :
- Analyse de l’environnement concurrentiel du marché des vins et spiritueux
Le marché des vins et spiritueux l'analyse des cinq forces de Porter :
Elle repose sur l'analyse des cinq forces de Porter qui sont les suivantes:
▪ le rôle de l'état ou plutôt les contraintes légales imposées par les différents états:
En effet les produits vendus par le groupe Pernod Ricard dans son ensemble sont des produits alcoolisés.
Cas de la France : La vente de boissons alcoolisés est fermement règlementée, a titre d'exemple, il est interdit et punit par la loi de vendre de l'alcool aux jeunes de moins de 18 ans considérés comme mineurs. De surcroît pour ce qui nous intéresse, la loi Evin concernant le volet sur l'alcool, vient limiter fortement le droit de faire de la publicité pour les boissons alcoolisées afin de protéger les jeunes des opérations de marketing. Cette loi a évidemment un impact considérable sur la façon de communiquer et de promouvoir la vente des produits Pernod Ricard. En effet, la promotion destinée au grand public des produits Pernod Ricard en France, passe par l'affichage par exemple dans les abribus ou les quotidiens sportifs. Mais le groupe est tenu de porter une mention indiquant que la consommation et surtout l'abus de l'alcool peut avoir des conséquences parfois irrévocables.
On peut également évoquer l’intervention de l’Etat relative à la sécurité routière, qui passe par une conduite irréprochable des conducteurs, conduite qui est maximale lorsque la personne au volant n'est pas alcoolisée ou du moins n'atteint pas le seuil répréhensible estimé dangereux par la loi. Pour la France, la tolérance de l'alcoolémie au volant est heureusement limitée a 0,5g/l d'air expiré au lieu de 0,7 g/l auparavant. Ce qui a eu pour conséquence de fortement baisser la consommation de produits alcoolisées dans le marché hors foyers, autrement dit cela a considérablement affecté les CHR.
De plus, les sanctions pour conduite en état d'ébriété se sont largement alourdies tout comme les peines prononcées par le tribunal correctionnel.
Cas des USA : En matière de restrictions légales, une loi limite l'importation de produits « biologiquement non stables » par mesure d'hygiène.
Il faut également savoir que l'alcool est taxé à 19,6%, car maintenant l'alcool est un produit consommable il ne fait pas partie des produits de consommation de première nécessité.
▪ Menaces des nouveaux entrants:
Il existe plusieurs barrières relatives à l'entrée de nouveaux entrants sur le marché telles que des barrières d'ordre physique voire technique comme par exemple pour l'exploitation du champagne Mumm, un produit phare du groupe Pernod Ricard. Etant donné que le vignoble champenois (de la région champagne) est saturé, les prix des terres sont hors de portée de la plupart des acheteurs désireux de se lancer dans la production de cet alcool de renom. De plus, les syndicats de producteurs régionaux demeurent un cercle assez fermé. La fabrication de cet alcool nécessite de travailler avec des spécialistes expérimentés de la « méthode champenoise » et qui travaillent déjà pour la plupart dans de grands groupes tels que LMVH etc.
Au niveau juridique, toujours dans le cas du champagne, l'A.O.C. ne peut être décerné à n'importe quel producteur qui voudrait produire du vin de champagne car les lois en la matière sont très strictes. Enfin, au niveau financier, hormis les coûts d'acquisition, il faudrait que les éventuels prétendants au marché du Champagne (pour ne citer que ce cas) puissent détenir une trésorerie importante afin de supporter les coûts de stockage des quantités d'alcools à produire.
Autrement dit, entrer sur un nouveau marché nécessite de forts investissements pour réaliser des économies d'échelle. De surcroît, il faut prévoir le coût lié à l'expérience, les coûts de production et surtout les barrières légales qui viennent gêner de manière significative les nouveaux entrants.
▪ Menaces des produits de substitution :
Ce sont des produits qui ne font pas partie du marché, mais qui cependant constituent une alternative à l'offre. Il peut s'agir de produits différents mais répondant à un même besoin.
Le caractère substituable des produits se vérifient bien du fait de leur élasticité croisée négative. En effet l'augmentation du prix d'un bien entraîne l'augmentation de la demande d'un autre bien. Pour notre cas, si le prix d’un Ricard venait à augmenter, le client substituerait le produit à une autre boisson anisée et alcoolisée de moindre prix ou alors à un alcool de tout un autre type comme la bière.
▪ Pouvoir de négociation des clients :
Les clients finaux du groupe sont les CHR et les ménages, mais en matière de « négociation des clients » il faudrait entendre négociation vis-à-vis des distributeurs, hors dans notre cas, ceux-ci sont intégrés dans le circuit de distribution.
En effet, le risque quant à la distribution, n'est pas encouru directement par la holding mais par les différentes filiales. Chez Pernod Ricard, c’est le réseau qui se charge d'écouler la marchandise auprès des GMS.
▪ Pouvoir de négociation des fournisseurs :
Le pouvoir de ces derniers est très important dans la mesure où les agriculteurs produisent la matière première des produits alcoolisés. Dans le cas où la rareté ou la pénurie de certains produits se feraient ressentir, cette éventualité aurait alors des conséquences certaines sur les tarifs finaux du marché.
Pour conclure, l’intensité concurrentielle de Pernod Ricard est importante tant les groupes sont internationalisés (LVMH, Rémy Cointreau etc). Cette forte concurrence au niveau des produits proposés, qui sont notamment de qualité, implique pour le groupe l’élévation de son image de marque par la mise en place d’une stratégie de « Premiumisation ». Il s’agit pour Pernod Ricard de faire de ses produits, des produits dits premiums, à la qualité encore plus élevée et se démarquer clairement de la concurrence. Cette stratégie s’est également accompagnée d’acquisitions de marques étrangères entrainant une expansion internationale, qui a permis de renforcer la position de leader sur les différentes zones géographiques, notamment celle de la Chine.
III. Développement stratégique du groupe Pernod Ricard
Le diagnostic stratégique conduit à la détermination du choix des domaines d’activités stratégiques de l’entreprise (DAS) dont découle le choix des options stratégiques, de sa structure organisationnelle et de l’allocation des ressources.
- Recentrage stratégique du groupe Pernod Ricard
Les objectifs initiaux poursuivis par Pernod Ricard étaient de diversifier la gamme des produits et surtout de s’internationaliser. Progressivement, de par ses différentes acquisitions dans le monde, le groupe s’est constitué un portefeuille de grandes marques internationales et un réseau de distribution mondial.
Le groupe s’est séparé de certains de ses domaines d’activités stratégiques tels que les boissons sans alcool afin de se recentrer sur un seul domaine d’activité stratégique, les Vins & Spiritueux. La vente d'Orangina (2001) a mis fin à sa stratégie corporate de diversification.
Le succès économique de Pernod Ricard réside aujourd’hui, dans le choix d’une stratégie de spécialisation impliquant une activité unique : celui des boissons alcoolisées appelées vins et spiritueux.
- Spécialisation: Choix de la stratégie générique
Le groupe a développé une stratégie générique qui est au cœur de la politique de « Premiumisation » du groupe: il s’agit d’une stratégie de différenciation vers le haut c’est-à-dire une sophistication des produits ou encore la montée en gamme des produits.
Cette nouvelle segmentation stratégique lui permet de regrouper et de gérer un portefeuille de marques mondiales importantes par type de boissons alcoolisées :
Les vins :
Il est N°4 mondial des Vins, avec environ 25 millions de caisses vendues en 2009.
Notamment avec des marques comme Jacob's Creek, Montana...,
Les spiritueux:
Il est Co-leader mondial des spiritueux, avec 97 millions de caisses (9 litres) vendues en 2009. Cela s'est fait grâce à son portefeuille de marques avec:
au niveau des whiskies: Ballantines's, Chivas Regal, Jameson, The Glenlivet...,
au niveau des alcools blancs et Rhums: ABSOLUT, Beefeater, Havana club...,
au niveau des anisés: Ricard, Pernod...,
au niveau des liqueurs: Malibu, Kahlùa...,
au niveau des Cognacs & Brandies: Martell, Suze, Amaro Ramazzoti...,
Les champagnes :
Il est N°4 des champagnes, avec 0,9 millions de caisses vendues en 2009.
Il possède des marques telles que: Mumm, Perrier-Jouët...,
Dans les années 2000, la prise de contrôle de ses concurrents par l’acquisition de Seagram (2001) et Allied Domecq (2005), lui ont permis de devenir co-leader mondial des spiritueux.
En outre, cette stratégie de spécialisation a conduit à diversifier les sources d'approvisionnement et les lieux de production, dans un souci de recherche de coûts de production faibles. Cela confirme cette envie constante de développement à l'international, sans sortir du second choix de spécialisation.
- Structure organisationnelle du groupe Pernod Ricard
Dotée d’une ambition mondiale s’appuyant sur ses racines locales, le groupe Pernod Ricard a adopté depuis sa création un mode d’organisation décentralisé. Celui-ci repose sur une organisation précise et structurée sur trois niveaux. Ainsi, le groupe est composé:
▪ d’une holding
▪ de deux types de filiales:
∙ Sociétés de Marques, responsables de la production et de la stratégie de leurs marques, qui garantissent le savoir-faire des marques.
∙ Sociétés de Distribution de ces marques internationales regroupées par région qui les commercialisent sur tous les marchés clés et qui peuvent elles-mêmes s’appuyer sur des marques locales puissantes.
Schéma récapitulatif de la structure organisationnelle du groupe et le rôle de chaque entité:
- La Holding se concentre sur la stratégie et le contrôle de l’activité du groupe : elle fixe les grandes lignes stratégiques à suivre.
- Les filiales prennent les décisions opérationnelles:
- Les Sociétés de marques développent la stratégie en matière de marketing.
- Les Sociétés de distribution adaptent cette stratégie aux marchés nationaux, en partenariat avec les sociétés de marques.
- Les filiales opérationnelles, Sociétés de Marques ou de Distribution, sont ainsi autonomes et responsables: elles sont proches de leurs consommateurs et des cultures individuelles de chacune des marques. Néanmoins, cela suppose une grande cohésion ainsi qu’une grande concertation entre les différentes entités, ce qui n’est pas toujours évident.
Pour conclure, comme le fait remarquer Patrick Ricard, le but est de « fixer une stratégie globale, puis l’adapter en fonction des besoins locaux et des habitudes de chaque pays. Ce n’est pas à Paris que l’on peut savoir comment réagit un consommateur sud-américain ». On peut ainsi résumer la stratégie du groupe via cette phrase: « Think Global, act Local. ».
IV. Politique stratégique du groupe à l’international
-
Développement du groupe à l’international
Le Groupe, depuis sa création, est toujours à la recherche de développement à l'international.
Aujourd’hui, il est co-leader mondial des vins et spiritueux, notamment grâce à ses différentes acquisitions à travers le monde.
Le marché mondial des Spiritueux et des Vins est marqué par des bouleversements qui obligent la firme à renforcer son développement à l'international.
Le marché des spiritueux est marqué par :
∙ une progression en valeur,
∙ la stagnation du segment des spiritueux locaux, majoritaires en volumes,
∙ la croissance du marché des spiritueux internationaux, tirée en particulier par le dynamisme des ventes de vodka et de scotch.
Le marché des Vins est marqué par :
∙ la croissance du marché mondial des vins de qualité,
∙ la montée en puissance des vins du Nouveau Monde,
∙ la forte contribution du marché américain et des pays émergents à la croissance.
Le Groupe souhaite exploiter les nouvelles tendances de marché, en s'exportant à l'international.
A cet effet, le groupe tient compte de différents facteurs qui sont de types: commerciaux, industriels, d’environnement et d’opportunités à l‘international.
∙ Au niveau commercial, le groupe dispose de certains atouts tels que:
∙ Le prestige de ses très grandes marques mondiales : Absolut Vodka et Chivas sont des icônes mondiales.
∙ Des marques adaptées aux différents marchés dans lesquels elles sont implantées (ex: whisky et cognac en Asie par exemple).
∙ Un portefeuille de marques renforcées : L'acquisition d'Allied Domecq ou encore de Seagram, lui a permis de renforcer son portefeuille de marques. Grâce à des marques de spiritueux telles que : Ballantine’s (11ème marque mondiale), Kahlua (n°3 mondial des liqueurs), Malibu (qui réalise 50 % de ses ventes aux USA), Beefeater (très présent en Amérique du Nord et au Japon... Dans les vins, le groupe passe de la septième à la quatrième place mondiale (grâce à Stoneleigh au R-U et en Nouvelle-Zélande).
∙ Pernod Ricard adapte ses produits afin de mieux répondre aux évolutions du marché mondial des vins et spiritueux grâce à la mise en place de son système de « Premiumisation » de son portefeuille de marque.
▪ Au niveau industriel, le groupe va tenir compte d'éléments importants:
∙ Des effets d'expériences, grâce à ses différentes acquisitions à travers le monde (ex: Havana Club International à Cuba en 1993, Larios en Espagne en 1997, Seagram en 2001).
∙ D’économie d'échelle : de part ses différentes acquisitions Pernod Ricard produit en plus grande quantité.
∙ D’un abaissement des coûts de production.
▪ Au niveau environnemental:
L'entreprise tient compte des différents accords existant entre la France et les autres pays. Grâce à ses accords Pernod Ricard dispose de facilité d'accès sur les marchés. Favorisé par la formation de l’Union Européenne, il est numéro 1 en Europe (n°1 en Irlande, en France (Absolut, Chivas), en Russie (Absolut Vodka), en Europe Centrale et dans les Pays Nordiques ; n°2 en Espagne, en Grèce et au Royaume-Uni et en Italie). Il est aussi numéro 1 en Asie-Pacifique (n°1 au Japon, en Chine et en Inde ; n°1 ex-aequo en Corée du Sud).
❖ Les opportunités au niveau international:
De par ses acquisitions, notamment celles de Seagram et Allied Domecq, l'entreprise a pu :
▪ renforcer son positionnement au niveau international :
∙ Grâce à la marque Beefeater son positionnement sur le marché Nord Américain a été renforcé par rapport à ses concurrents.
∙ Les marques Presidente, Don Pedro et Los Reyes ont fait augmenter la part de marché du groupe de 2 % à 28 % au Mexique.
∙ En Corée, les marques Imperial et Ballantine's ont renforcé la présence du groupe en Corée du Sud (avec une part de marché passant de 5 à 34 %).
∙ Ballantine’s, Beefeater, Malibu sont aussi à l'origine de sa croissance en Espagne et au Royaume-Uni.
▪ profiter d'opportunités stratégiques (avec l'acquisition d'Absolut Vodka, leader mondial des Vodkas premium et qui est une marque culte),
▪ se positionner sur les marchés émergents et à fort potentiel. Ces nouvelles économies comptent des marchés comme le Brésil, la Chine, la Russie et l’Inde, pays où le groupe souhaite doubler en taille d’ici 5 ans. Pour rester leader, Pernod Ricard consolide en permanence ses positions sur les marchés émergents qui vont constituer un moteur de croissance pour l'entreprise.
La taille de Pernod Ricard a pratiquement doublé avec l'acquisition de cette entreprise, ce qui va représenter un véritable saut stratégique pour le groupe, grâce à son portefeuille de marques et sa présence mondiale.
Cette présence à l'international a permis à Pernod Ricard de se développer sous différents angles. Le groupe possède :
∙ Des marques mondiales et prestigieuses, adaptées aux différents marchés,
∙ son expérience internationale : grâce à ses différentes acquisitions de firmes à travers le monde, cela lui a permis de développer …
∙ …un réseau de distribution mondiale,
∙ un budget important de R&D, de communication (environ 1 milliard d’euros dépensé en communication et marketing soit 15% du Chiffres d’Affaires annuel),
∙ la capacité financière: grâce à sa politique de désendettement rapide dès 2008/2009, avec la cession d'actifs (qui lui rapportera 1 milliard d'euros).
∙ les compétences organisationnelles et personnelles: le partage des valeurs, la gestion des talents à travers la promotion de la diversité et de la mobilité, et enfin l'émergence d'une vraie culture du leadership.
∙ les compétences marketing et logistiques: Cela est mis en évidence par son portefeuille de marques très fournis.
« Penser globalement, agir localement »
- Les marchés étrangers visés et ses modalités de pénétration
La stratégie de croissance de Pernod Ricard est axée sur la croissance externe. En effet, il s’agit pour le groupe d’acquisitions de concurrents afin de pénétrer de nouveaux marchés nationaux. Ce type de développement à l’international permet l’acquisition d’une marque locale pour bénéficier d’un avantage en matière de distribution, de connaissance du marché et de communication.
Pernod Ricard prend en compte les spécificités culturelles de chaque pays en proposant d’abord un produit local bénéficiant d’une bonne notoriété sur le marché.
Ainsi, le groupe utilise un subtil mélange entre marques locales et internationales pour pénétrer les marchés étrangers et s’y imposer. Pernod Ricard utilise au maximum les atouts de ces filiales (sociétés de marques et sociétés de distribution) afin d’asseoir sa position sur le nouveau marché.
On peut néanmoins définir 4 grandes périodes pour le groupe avec des stratégies de pénétration de marchés différents mais toujours basées sur de la croissance externe :
Années 1980 à 1984 : Premières acquisitions internationales
1981 : Acquisition aux Etats-Unis d’Austin Nichols (producteur et distributeur du bourbon
Wild Turkey)
1982 : Acquisition de SIAS MPA, premier producteur mondial de préparations aux fruits
pour l’industrie agro-alimentaire.
1984 : Acquisition dans le secteur des boissons non alcoolisées de La Compagnie Française
des Produits Orangina.
Les premières acquisitions avaient pour but de se développer à l’international, en pratiquant une stratégie de diversification (boissons non alcoolisées, fruits, whisky). L’un des premiers marchés visés par l’entreprise est le marché américain. Pour la 1ère fois, en 1984, le chiffre d’affaires à l’international dépasse les ventes en France.
Années 1985 à 1996 : Construction du réseau mondial
1985 : Acquisition de Amaro Ramazzotti en Italie.
1988 : Acquisition du principal producteur de whisky irlandais, Irish Distillers, propriétaire
de marques prestigieuses (Jameson, Paddy, Bushmills et Powers).
1989 : Acquisition en Australie du groupe Orlando Wyndham (vins, notamment la marque
Jacob’s Creek).
1991 : Premières réussites en Asie
1993 : Pernod Ricard et la société cubaine Cubaron créent Havana Club International, joint venture destinée à la commercialisation du rhum Havana Club.
Le groupe a racheté des marques, pays par pays, en prenant garde de conserver des racines locales pour satisfaire leur ambition mondiale. Durant ces années, les marchés visés se concentrent sur trois continents : l’Europe (Italie, Irlande), l’Asie et l’Amérique du Nord (Cuba) toujours par le biais de croissance externe (acquisition ou joint-venture)
Années 1997 à 2000 : La structuration
1997 : Acquisition de la société espagnole Larios
1999 : Acquisition de la société Yerevan Brandy Company (Ararat), et acquisition d’Agros et
des droits internationaux de la vodka polonaise Wyborowa.
2000 : Acquisition de la tequila Viuda de Romero au Mexique.
Au cours des années 1997 à 2000, le groupe cherche à structurer ses marchés et ses marques en étant présent en Europe notamment (Espagne, République Tchèque) et en continuant son expansion en Amérique du Nord (Mexique) toujours par le biais d’acquisitions, modalité de pénétration phare pour Pernod Ricard.
Années 2001 à 2010 : Les grandes acquisitions et le recentrage sur les
vins et spiritueux
2001 : Acquisition de 38% des activités vins & spiritueux de la société canadienne Seagram.
Programme de cessions des actifs dans le secteur sans alcool (Orangina, JFA Pampryl et SIAS MPA sont vendus).
Chivas Regal, Martell et The Glenlivet étoffent le portefeuille de marques initial.
2004 : Acquisition de Framingham Winery (vins) en Nouvelle Zélande.
Désengagement de quatre actifs non stratégiques (activité hors spiritueux) :Granger & Bouguet Pau, Crus et Domaines de France, solde des activités d’Orangina, Marmande Production.
2005 : Acquisition d’Allied Domecq en partenariat avec Fortune Brands pour un montant total
de 10,7 Mds d’€. Les marques de spiritueux Ballantine’s, Malibu, Kahlúa, Beefeater, Stolichnaya
et de vins (Montana, Campo Viejo, Graffigna), ainsi que les champagnes Mumm & Perrier-Jouët rejoignent le portefeuille du Groupe et cession du gin Larios et de The Old Bushmills Distillery.
2007 : Pour se concentrer sur les marques clés du portefeuille, cessions par Pernod Ricard en
Nouvelle-Zélande du vin Framingham et par Pernod Ricard Italia du vin Canei.
2008 : Acquisition du groupe suédois Vin & Sprit, propriétaire de la vodka ABSOLUT pour 5.69 milliards d’euros et cession des marques de brandies et de vins Jerez par Pernod Ricard España et cession de Cruzan Rhum.
2009 :Ventes de Wild Turkey Bourbon, Bisquit Cognac, Star Gin, Red Port, Dry Anis, Lubuski Gin, Serkova Vodka, Grönstedts Cognac et de la liqueur Tia Maria
Les marques Malibu et Kalhúa rejoignent la filiale suédoise The Absout Company le 1er juillet 2009.
- La politique internationale du produit
Le groupe Pernod-Ricard gère un portefeuille de 14 marques de spiritueux et champagnes, de 4 marques de vins premium et de 18 marques locales de spiritueux autour desquels s’organise sa politique internationale de produits.
- L’adaptation ou la standardisation
Pernod-Ricard présente à la fois des caractéristiques inhérentes à une stratégie de standardisation et à une stratégie d’adaptation. Il a développé des marques dites « stratégiques » de spiritueux et de vins au niveau international et a soutenu leur présence sur les marchés nationaux par la distribution de 18 marques locales.
L’importance des attributs physiques (aspect matériel du produit) et symboliques (signes dont les particularités varient en fonction de la culture) ont permis de déterminer les éléments à standardiser ou à adapter.
- Les critères de segmentation internationale
La segmentation du groupe se retrouve à l’échelle internationale et se base sur:
▪ Des variables psychographiques:
∙ en fonction du de style de vie des consommateurs : « on distingue quatre types de consommateurs :
- Les Héritiers : pour eux, le luxe est un art de vivre et un plaisir. Ce sont souvent des connaisseurs recherchant la qualité, le savoir-faire, l’authenticité, la rareté, voire l’exclusivité.
- Les Accédants : le luxe permet d’affirmer son statut social et de ressentir un sentiment d’appartenance à une élite. Ces consommateurs recherchent des marques qui expriment «visiblement » le luxe.
- Les Extravagants : le luxe est une façon d’exprimer sa différence, de séduire. Ils aspirent à vivre une vie de VIP, voire de stars.
- Les Nouveaux Créateurs : une nouvelle élite : les esthètes. Le luxe doit refléter leurs fortes individualités, leurs personnalités créatives. L’objet devient une œuvre d’art.
On retrouve cette segmentation à l’échelle internationale mais l’importance de chaque catégorie varie selon les régions. ». Cette segmentation date de l’année 2007-2008 et a évolué par l’apparition de nouvelles catégories de consommateurs, au total 14, qui correspondent aux marques phares à vocation internationale. A chaque marque est attribuée une personnalité et se réfère à un sport ou une culture de référence. En voici quelques exemples :
- Absolut : le consommateur est universel, ouvert d’esprit, dynamique et souvent en voyage. Cette vison a été conceptualisé par une bouteille « nue » sans étiquette, ni logo, vendue en duty free et qui représente une vision du monde plus diverse et vise à combattre étiquettes et préjugés.
- Chivas Regal : Le consommateur visé par cette marque sont des individus raffinés et adeptes de sport (golf et polo), qui se considèrent comme des hommes à part. La marque met en avant les valeurs suivantes : la fraternité, la galanterie, l’humour et la loyauté.
- Martell-Mumm & Perrier-Jouët : Marques de champagne pour un consommateur recherchant la qualité, un savoir-faire unique.
- Irish Distillers : C’est une marque de renommée internationale qui attire un consommateur sociable, festif et joyeux et adepte de cinéma.
- Havana Club International : Il s’agit pour la marque de construire un positionnement aspirationnel et émotionnel basé sur les valeurs de la culture cubaine.
- Malibu: Le consommateur en général, jeune et soucieux a besoin d’exprimer son originalité et est en quête d’exotisme venant des Caraïbes. Il est adepte du surf ou de volleyball.
- Pernod Ricard Pacific : privilégie un mode de consommation à la française notamment à Montréal, New York, Cancun et Londres (événements marketing), pour les consommateurs adeptes de saveurs légères et rafraichissantes.
▪ Des variables socio-économiques :
Par ailleurs, le groupe a effectué une sous-segmentation de chaque marché de produits selon le niveau de gamme:
∙ en fonction du pouvoir d’achat des consommateurs : Cette segmentation s’introduit dans la stratégie dite de « Premiumisation » et permet une différenciation à la fois par les prix et par le procédé de fabrication des boissons. Plus le consommateur monte en gamme, plus le prix est élevé et la qualité de l’alcool meilleure. On distingue cinq catégories de marques Premium : Prestige (prix supérieur à 84$), Ultra Premium (42$-84$), Super Premium (26$-41$), Premium (17$-25$), Standard (10$-16$), Local/Value (inférieur à 10$). Face à la montée du pouvoir d’achat et à la nouvelle conception du luxe parmi les consommateurs (qui lui permet de s’identifier par rapport à un groupe), cette segmentation n’est plus solvable et est aujourd’hui basée en fonction de l’avantage recherché.
∙ en fonction du sexe : le développement de la marque « Premium Wine Brands » a été crée pour cibler une clientèle féminine alors que les marques de Spiritueux et Champagnes visent une clientèle plus générale.
▪ des variables comportementales :
∙ en fonction de la situation d’achat : la création d’éditions spéciales pour les périodes de fêtes ou de séries limitées à certaine période de l’année répond à cette variable.
∙ en fonction de l’avantage recherché : cette sous-segmentation répond à la stratégie actuelle de « Premiumisation », chaque gamme étant associée à un expérience de consommation.
La plupart des produits (excepté les éditions et séries limitées) ayant été sujet à des procédés de fabrication nouveaux, ils doivent faire leurs preuves sur un marché national avant d’être vendus par phases successives sur d’autres marchés.
❖ La gestion des marques au niveau international
Le nom « Pernod-Ricard » qui représente la marque au niveau international, reste long et difficile à mémoriser et à prononcer pour les consommateurs étrangers. De plus, il n’est pas porteur de sens car il ne renvoie ni à une catégorie ou a des attributs de produits spécifiques. N’ayant pas de pouvoir symbolique, il est difficile à transposer dans un contexte culturel différent et n’amplifie donc pas en soit le positionnement de la marque au niveau international. Toutefois, la difficulté de prononciation à l’étranger est à l’origine d’un effet favorable pour la marque d’origine française, étant donné la renommée internationale des produits de luxe français à l’étranger.
C’est pourquoi, la marque Pernod-Ricard a su créer de la valeur, au niveau de l’entreprise grâce à sa stratégie de « Premiumisation » et d’innovation et au niveau des consommateurs grâce à la personnalisation des produits à travers les marques stratégiques, qui leur permettent de se repérer suivant leurs modes de consommation. Pernod-Ricard a aussi développé un caractère ludique avec sa politique de mécénat, faisant intervenir des artistes du monde entier.
Les produits sont largement reconnus sous leur nom de marques stratégiques, il reste au groupe de faire connaître aux consommateurs ou de montrer de manière évidente leur appartenance au groupe « Pernod-Ricard ».
Conclusion
La volonté initiale de s’internationaliser de Pernod Ricard a présenté des enjeux considérables tant au niveau interne et externe. Le groupe a dû effectuer le recentrage de ses activités afin de mieux répondre à la demande et de devenir un acteur incontournable dans le marché des boissons alcoolisées. Cette décision lui a permis d’acquérir des avantages compétitifs par la recherche de coûts faibles et l’innovation constante de ses produits, des avantages de localisations géographiques par des coûts de production faibles et des modalités de pénétration avantageuses. Il a également favorisé une structure d’organisation matricielle qui a permis de réduire les coûts de transaction et de réaliser des économies d’échelle.
En effet, le groupe organisé principalement autour de filiales implantées à l’étranger, qui ont leur propre politique de commercialisation tout en respectant les grandes lignes directrices de la maison mère, a su assurer une présence locale sur chacun de ces marchés afin de s’adapter au mieux aux consommateurs et de réduire les coûts notamment liés au transport.
Cependant, suite aux enjeux économiques actuels (crise financière 2007-2009, fluctuation des taux de changes), le groupe Pernod Ricard se doit de rester attentif à sa dette financière qui s’élevait à 10 323 M€. Afin de réduire cette dette, sa stratégie de « Premiumisation » a eu un effet prix/mix très positif notamment grâce à des investissements marketing importants. Elle profite également du fort dynamisme des nouvelles économies émergentes sur le continent asiatique, notamment avec la Chine qui est devenue première puissance mondiale en Août 2010.
Par ailleurs, suite à la baisse du pouvoir d’achat de la plupart des économies occidentales (Europe et Etats-Unis), la saturation du marché sur ces zones géographiques conduit le groupe à anticiper et investir davantage sur les marchés émergents. Malgré, un redressement économique progressif aux Etats-Unis où la performance de Pernod Ricard s’améliore et une légère hausse du chiffre d’affaires sur le marché européen, le groupe doit veiller aux fluctuations de l’euro et du dollar qui ont été importantes durant l’exercice 2010/2011. Elle doit aussi contrôler sa stratégie de « Premiumisation » qui implique des prix élevés pour des produits de qualité, dans la mesure où le pouvoir d’achat n’est pas identique partout dans le monde.
D’après cette analyse du processus d’internationalisation, le groupe Pernod Ricard a développé une stratégie de long terme et a pour but final de faire en sorte que l’environnement s’adapte au groupe. En effet, malgré une attention particulière aux mentalités et cultures locales des différents marchés, elle cherche avant tout à faire adhérer les différents consommateurs à toutes les marques stratégiques, qui chacun à leur rythme atteindront toute une renommée internationale.
« Act Local, Think Global »
BIBLIOGRAPHIE
Document de Référence 2009/2010
Rapport Annuel 2009/2010
Rapport Annuel 2006/2007
Dossier de Presse 2009
Entreprendre, Magazine Pernod Ricard
Press & Capital Market Day, Pernod Ricard 2009: LES MARQUES PREMIUM AU COEUR DE LA NOUVELLES ECONOMIE MONDIALE
AUTRES SOURCES
COELHO, RASTOIN, Statégie de développement des grandes firmes de l’industrie mondiale du vin sur la longue période (1980-2005), 2006, MOISA
MAYRHOFER, Management Stratégique, 2007, Bréal
http://www.pernod-ricard.com/fr/pages/148/pernod/Groupe/Gouvernement-d-entreprise/Bureau-Executif-et-Directeurs-de-laHolding.html
Dossier de presse économique et Financier Pernod Ricard, Février 2010
Magazine Entreprendre, n°51 automne-hiver 2007/2008, Le magazine des actionnaires de Pernod Ricard