Lui-même se définit d’ailleurs comme un écrivain « français donc francophone », et envisage la littérature romanesque comme étant « un bon moyen de comprendre le monde actuel ».
J.M.G. Le Clézio est né le 13 avril 1940 à Nice. Franco-mauricien d’origine anglo-bretonne, il connaît très tôt le succès avec Le procès verbal (1963), récit proche de L’Etranger de Camus, du Nexus de Miller et des recherches narratives du Nouveau Roman, baigné par le climat de la guerre d’Algérie finissante. Ce premier roman lui vaut le prix Renaudot. Il est expulsé de Thaïlande, où il effectuait son service militaire, en 1967 pour avoir dénoncé la prostitution infantile. Au Mexique où il est envoyé, il étudie le maya et le nahuatl et partage pendant quatre ans la vie des indiens Embéras et Waunanas, au Panama,
expérience qu’il qualifiera plus tard de « bouleversante ». Il écrit avec sa deuxième femme, originaire du Sahara occidental, Sirandanes, recueil de devinettes proverbiales courantes à Maurice, et Gens des nuages.
Dès la fin des années 60, il élabore des œuvres plus personnelles, moins marquées par le formalisme, sans perdre sa capacité de révolte mais dominées par l’exploration de l’ailleurs et les préoccupations écologiques (Terra Amata, Le Livre des fuites, La Guerre), de plus en plus influencées par ses voyages (Les Géants). Ses essais mettent en évidence son cheminement méditatif nourri par la culture des indiens Embera, dirigé vers le panthéisme (L’Extase matérielle), la culture indienne, l’onirisme et l’expérience des drogues (Mydriase, Haï), et toujours la recherche d’une échappatoire à la société occidentale et urbaine contemporaine. Il dénonce la « guerre » cynique du monde mercantile (La Guerre), le scandale de l’exploitation des enfants (Hasard) et des cultures minoritaires.
Cette révolte demeure sensible dans les romans plus populaires des années 1980 : haine de l’impérialisme colonial (Désert :best seller en 1980), et du système qui en découle (Onitsha), rejet de la guerre destructrice (première guerre mondiale dans Le Chercheur d’or, guerre du Biafra dans Onitsha), des nouvelles formes d’exploitation (prostitution, trafics humains dans Désert).
Ses engagements aboutissent dans les années 2000 à des œuvres plus nettement amères et critiques envers l’évolution occidentale moderne, en particulier le roman Ourania (2005), histoire du rejet catégorique du monde moderne par un groupe de chercheurs dans une vallée mexicaine perdue, ou Raga, Approche du continent invisible (2006), défense ardente des peuples insulaires d’Océanie, menacés par la mondialisation. Son penchant autobiographique s’exprime dans Révolutions (2003), il rend hommage à son grand père dans Chercheur d’or (1985) et La Quarantaine (1995) et à son père dans l’Africain(2004) avant de s’inspirer du personnage de sa mère dans Ritournelle de la faim pour lequel il se verra décerner le prix Nobel de littérature en octobre 2008, en tant qu’ « écrivain de nouveaux départs,de l’aventure poétique et de l’extase sensuelle, explorateur d’une humanité au-delà et en dessous de la civilisation régnante ». Il est également l’auteur d’une quarantaine d’œuvres de fiction (romans, contes, nouvelles) et d’essais et c’est l’un des auteurs les plus traduits dans le monde.
Tableau :
Onirique : qui évoque le rêve, qui est inspiré par le rêve.
Panthéisme : système religieux, philosophique qui identifie Dieu et le monde./ Divinisation de la nature.
Nahuatl : langue parlée par les Nahua et jadis adoptée par les Aztèques comme langue littéraire.
Formalisme : respect scrupuleux des formalités, attachement excessif à l’étiquette./Tendance, en art notamment, à privilégier les valeurs formelles au détriment du contenu