L'approche psychologique du racisme cherche à rendre compte des motivations individuelles et collectives des opinions et des attitudes qui le manifestent. Le mécanisme fondamental du racisme est l'exclusion, le rejet de l'Autre, qui naît de la peur archaïque de l'inconnu.
Des recherches menées aux États-Unis, notamment par T.W. Adorno, suggéraient que les «personnalités autoritaires» étaient particulièrement enclines au racisme. Ces individus, peu sûrs d'eux, conformistes, idéalisant les représentants de l'autorité, ont tendance à refouler leur affectivité, à dénigrer la faiblesse et à projeter leur agressivité sur le monde extérieur. Ils ont d'autant plus besoin de renforcer leur identité qu'ils sont fragiles. Ces recherches montraient aussi que ces personnalités étaient le résultat d'une éducation répressive, et d'autres travaux ont mis en lumière l'importance des facteurs culturels dans la prégnance des préjugés racistes. Dans un milieu où les propos et les comportements racistes sont dominants, même des personnalités non définies comme autoritaires les reproduisent sans que des besoins psychologiques profonds soient en cause. Le processus d'exclusion peut en effet être motivé par l'intérêt: l'Autre est perçu comme un concurrent. Le racisme est alors la justification de l'élimination de ce concurrent face auquel on défend ses avantages.
Racisme en France est un sujet qui préoccupe plus en plus des citoyennes françaises aujourd’hui. Que se passe en ce qui concerne la racisme en France dans la date d’aujourd’hui ? Les Français sont-ils racistes ? Les sont-ils plus ou moins qu'avant ? Divers sondages, interprétés diversement, ont été invoqués, soit pour s'inquiéter d'une nouvelle poussée de racisme, soit pour se réjouir d'une « décrispation des Français » sur la question de l'immigration. Autant le dire tout de suite : aucun de ces diagnostics n'est satisfaisant.
C'est le constat d'une enquête menée pour la première fois par la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH), avec l'aide de la SOFRES, auprès des victimes des discriminations raciales, un panel composé de personnes d'origine maghrébine, en provenance d'Afrique noire et originaires des DOM-TOM. Pour ces personnes qui s'estiment victimes de discriminations raciales, le racisme est un sentiment individuel qui se retrouve chez tout homme, quelle que soit sa couleur. La France n'est pas raciste mais il y a des Français qui le sont. Le terme est utilisé comme synonyme de «rejet de l'autre», de «différence», y compris entre personnes de même ethnie. Dans la lutte contre les discriminations, les attentes sont donc très fortes vis-à-vis de l'Education nationale, sensée éduquer à la tolérance et donner le «bon exemple», ou des associations de terrain. Elles le sont moins vis-à-vis des associations de défense des droits de l'Homme ou de l'Etat, qui se placent sur le champ de la sanction ou de la condamnation morale, jugé «peu crédible». Les personnes interrogées ne sentent de l'État «ni volonté forte, ni engagement sur ce sujet», les associations ont une image d'inefficacité et la justice est au mieux inefficace, au pire hypocrite, avec des lois jugées peu applicables. La discrimination raciale est vécue comme un malaise diffus, persistant, ses manifestations sont insidieuses, difficiles à prouver. Ce sont des démarches plus longues, des promotions professionnelles bloquées, parfois simplement des «regards», des «gestes»,
Connue pour sa tradition d’immigration, la France s’est longtemps glorifiée sur sa capacité d’accueillir des étrangers. On enseigne aux enfants français qu’au-delà de la couleur et de l’arrière-plan culturel, on est français. Jean Claude Barreau, un conseiller au ministre intérieur du parti d’extrême droit a expliqué: “Quand quelqu’un passe en France, il ne change pas simplement son pays mais son histoire aussi. Les étrangers qui arrivent en France doivent comprendre que leurs ancêtres sont les Gaulois et qu'ils ont une nouvelle patrie.”
Derrière cette ambiguïté, la France reste un pays qui est un des pays de l’Europe de l’ouest le plus raciste. Selon un sondage officiel, le mois dernier quatre personnes sur dix admettent d’être “racistes” ou “assez racistes.” Ce nombre est presque le double de l’Allemagne, de la Grande Bretagne, ou de l'Italie. Ce sondage, frappant, a prouvé que le sentiment raciste n’est pas limité au 15% qui votent pour M. Le Pen. Certaines de ces personnes votent pour les partis de gauches. Dans un sondage séparé, les résultats ont dit que la moitié des Français se plaignent qu’ils ne se sentent plus “à la maison.”
Il y a d'autres facteurs tels que les différences raciales, qui ennuient les Français. C’est ce qu’ils voient. Dans les parties de quelques villes, les minorités prédominent dans les rues. Des centaines de mosquées et de centres de prières des Musulmans ont été établis à côté d’églises presque vides. Le chômage est beaucoup plus élevé parmi la population non-blanche, et les minorités dans les prisons Françaises est hors de proportion. Réciproquement, les Français de minorité sont sous representés dans le monde des affaires et de la politique. Ces statistiques indiquent pourquoi le slogan pour la droite, “le Français d’abord” est si attrayant. M. Megret, autrefois la main droite de Le Pen est pour la préférence nationale. Il déguise son racisme sous forme de patriotisme. En réclamant la priorité de l’assistance sociale pour les Français ainsi que, des travaux, ou en logements, il peut persuader les électeurs inquiets qu’il est pour, “l’amour de votre pays.”
Bien que la droite, lointaine de la France continue à menacer la politique française, il reste l’autre moitié de la France. Ils sont jeunes, multiculturels, et inspirés par l’Amérique. La phrase, “black, blanc, et beur” a été intégrée dans le français de tous les jours. La victoire de la Coupe du monde l’année dernière était un modèle d'intégration raciale. Cette équipe tricolore était un mélange de black, blanc, et beur. Le Premier ministre, Lionel Jospin a dit, “Quel meilleur exemple de notre unité et diversité que cette magnifique équipe!” Si tout va bien l’harmonie multiraciale qui a régné dans l’équipe de football de la France peut être une inspiration qui devrait transformer notre vie quotidienne.
Il est en effet très aventureux de parler, comme certains commentateurs, d'une banalisation « en train de s'opérer », et d'affirmer qu'« on découvre une opinion très réceptive aux idées de l'extrême-droite ». Car si le racisme s'exprime dans les récents sondages un peu plus ouvertement que l'année précédente (un nombre légèrement supérieur de Français se disent racistes et déclarent qu'il y a trop de maghrébins), ces réponses sont malgré tout inférieures à ce qu'elles étaient il y a deux, trois ou quatre ans.
Mais une vision trop optimiste est tout aussi aventureuse. On ne peut notamment pas affirmer, comme l'ont fait certains commentateurs, que « l'opinion » (prise comme un bloc) est devenue à la fois moins raciste (moins favorable à la « préférence nationale ») et plus honnête (s'avouant plus facilement raciste). Il existe en effet une interprétation plus simple et bien plus vraisemblable, mais à laquelle ne pensent jamais les politologues, trop habitués à faire de l'opinion publique une personne parlant d'une seule voix (la voix majoritaire) : l'opinion est peut-être devenue tout simplement plus divisée qu'avant. Sans doute est-il vrai que, depuis quelques années, les Français tolèrent plus les immigrés et moins la discrimination - et c'est tant mieux. Mais il faut garder à l'esprit que cette tolérance à l'immigré et cette intolérance à la discrimination ne sont que des opinions. Or, des opinions, même sincères, n'ont jamais suffi à faire cesser l'injustice. Dans La désobéissance civile, Thoreau constatait amèrement : « de nombreuses personnes sont opposées en opinion à l'esclavage, mais ne font rien pour l'empêcher ». Et il ajoutait ceci, qui reste valable aujourd'hui : une injustice ne cesse pas quand les citoyens cessent d'être d'accord, mais quand ils s'engagent dans une « action ardente et efficace pour faire cesser le mal ». Or, sur la possibilité d'une telle action contre les discriminations, et contre toutes les injustices que subissent les immigrés et leurs enfants, aucun sondage ne nous dit quoi que ce soit.
Et de fait, pendant que les Français, par sondages interposés, font leurs aveux (de racisme) ou leurs professions de foi (d'antiracisme), pendant que les aveux ou les conversions font la une des journaux et pendant que les commentateurs commentent, les discriminations et les expulsions continuent.
Il faut en effet le rappeler : un tiers des emplois sont aujourd'hui légalement interdits aux non-européens, et sur les deux tiers restants, la discrimination illégale s'exerce massivement, dans une parfaite impunité. Il faut rappeler aussi qu'il y a toujours, en France, soixante mille sans-papiers non-régularisés, renvoyés vers la clandestinité et le travail précaire. Il faut le rappeler parce que, bizarrement, ce qui occupait la une des grands médias et faisait descendre jusqu'à cent mille personnes dans la rue sous le gouvernement Juppé continue aujourd'hui dans un silence de mort : des Lillois, en grève de la faim depuis soixante jours, risquent leur vie pour des papiers, et n'obtienne pour réponse que l'envoi des forces de l'ordre ; d'autres, à Toulouse, sont arrêtés, placés en rétention ou expulsés dès le premier jour de leur grève de la faim ; le peu de militants encore engagés à leurs côtés est aimablement invité à rentrer chez soi, à coup de matraques et de poursuites judiciaires.
De cette violence institutionnelle, les sondages ne nous disent rien. Comment le pourraient-ils, puisque les Français ne sont pas informés, et que seuls sont interrogés les futurs électeurs, donc les Français ? Il y a là une forme de discrimination particulièrement choquante : des pages entières sont consacrées au racisme sans que les sondeurs ou les commentateurs interrogent jamais ceux qui sont les mieux placés pour le connaître.
C'est là pourtant que tout se joue : pour qu'il y ait chez les Français une réelle prise de conscience, un élan de sympathie et un engagement pour « faire cesser le mal », il faut avant tout que les immigrés soient vus et entendus. C'est d'ailleurs cet accès des immigrés à la visibilité et à la parole publique, engagé depuis Saint Bernard, qui a produit le début de « décrispation » que les instituts de sondages ont enregistré sans pouvoir l'expliquer. Il en a toujours été ainsi, avec les immigrés comme avec les Noirs, les femmes ou les homosexuels : la prise de parole des opprimés a toujours ce double effet de « décrisper » les majorités silencieuses, tout en crispant davantage une minorité d'irréductibles.
On ne peut donc pas se contenter d'une condamnation verbale du racisme : si on veut vraiment que cessent tous les racismes et toutes les exclusions, y compris institutionnelles, ce ne sont pas des sondages qu'il faut, ni même des éditoriaux alarmistes, mais un simple travail d'information sur ce que vivent les immigrés.